L'ingratitude semble effectivement avoir atteint un niveau préoccupant à notre époque, et ce phénomène peut être attribué à plusieurs facteurs interconnectés. D'une part, l'avènement et l'omniprésence des réseaux sociaux ont créé une culture de la comparaison constante. Chacun est exposé aux succès (souvent idéalisés) des autres, ce qui peut engendrer un sentiment d'insuffisance et une difficulté à reconnaître la valeur des aides reçues. La gratification instantanée, promue par ces plateformes et la société de consommation en général, contribue également à une diminution de la patience et de la reconnaissance. Lorsque tout est immédiatement accessible, l'effort et la générosité d'autrui sont moins perçus comme des gestes exceptionnels et deviennent presque des attentes.
D'autre part, l'individualisme croissant dans nos sociétés modernes joue un rôle non négligeable. La valorisation excessive de l'autonomie et de la réussite personnelle peut paradoxalement mener à une minimisation de l'apport des autres dans notre propre parcours. Certaines personnes, prises dans une quête incessante de reconnaissance et de succès, peuvent même percevoir la gratitude comme une forme de faiblesse ou une dette, préférant s'attribuer tout le mérite de leurs accomplissements. Enfin, un certain cynisme ambiant et une méfiance généralisée envers les intentions d'autrui peuvent également étouffer le sentiment de gratitude, transformant un don en une potentielle manœuvre calculée plutôt qu'un geste désintéressé. Pour inverser cette tendance, un retour à la valorisation de l'altruisme et une éducation à l'appréciation des petites et grandes attentions semblent plus que jamais nécessaires.